Une sortie précipitée. Pour faire taire les critiques qui l’accusaient de retarder la parution du rapport, l’Ademe a riposté. Et sorti dans la précipitation la fameuse étude tant attendue sur le bilan environnemental des biocarburants. Les mauvaises langues y voyaient là un moyen détourné de ne pas compromettre la phase expérimentale des biocarburants de deuxième génération, produits à partir de biomasse. Il faut dire que la parution du rapport sur les biocarburants de première génération peut laisser planer quelques doutes sur la possibilité de développer ces nouveaux carburants.
La palme de l’éco-compatibilité revient sans conteste à l’éthanol de canne à sucre. Son bilan est largement positif : 78 % d’émission de gaz à effet de serre en moins par rapport à l’essence et 80 % d’économies d’énergie au cours de sa fabrication. Au rang des bons élèves suit le diester produit à base de graisse animale ou d’huile végétale usée. La principale leçon à retenir de cette étude, réalisée par le bureau Bio Intelligence Service, c’est que « la majorité des agrocarburants de première génération s’avèrent moins émissifs de gaz à effet de serre que les carburants fossiles représentant une économie moyenne de 60 à 80 % pour les plus performants ».
Changement d’affectation des sols et déforestation…
Viennent ensuite l’éthanol de blé, de maïs, de betterave, le biodiesel de tournesol, d’huile de palme et de soja. Globalement, tous ces biocarburants se situent dans une moyenne acceptable et s’avèrent nettement moins émissifs que les carburants issus d’énergies fossiles. En revanche, une filière pose problème. Le bilan s’avère nettement plus contrasté si l’on s’intéresse à la filière ETBE. Issus également de l’éthanol de blé, de betterave ou de maïs, les biocarburants issus de cette filière sont produits en association avec une base pétrolière : l’isobutène. Ce qui impacte considérablement son bilan environnemental. Pourtant plus économique et plus simple à préparer, la filière ETBE (éthyl tertio butyl éther) ne satisfait pas. Paradoxalement, elle est la méthode la plus développée en France. Mais avec à peine 20 % d’émissions de gaz à effet de serre en moins, ces biocarburants ETBE ne passeront pas l’examen européen qui impose, à partir de 2017, une économie d’au moins 50 %.
La grogne des ONG, des écologistes et de certains scientifiques concerne les méthodes de calcul. Le bureau Bio Intelligence Service, pour effectuer cette étude, a pris en compte le périmètre agricole, de la culture des plantes à leur transport et transformation industrielle. Or, on ne parle ni de changement d’affectation des sols ni de déforestation. Comme le souligne Jean-Louis Bal, directeur des énergies renouvelables à l’Ademe, « on peut avoir des émissions deux à quatre fois supérieures du fait du changement d’affectation des sols, on peut alors parler de bilans catastrophiques ». Citons par exemple les biocarburants produits à base d’huile de palme ou de soja, cultivées sur des sols débarrassés de toute forêt tropicale. Les Amis de la Terre vont même plus loin : « En intégrant les émissions dues à la déforestation en Indonésie, le bilan GES de l’huile de colza est le double de celui du diesel qu’il remplace ».