« Nous avons été saisis du procès-verbal de l’ASN, nous l’examinons et déciderons plus tard des suites à lui donner », a déclaré aujourd’hui (vendredi 16 octobre) le Parquet d’Aix-en-Provence, qui a ouvert une enquête préliminaire. L’Autorité de Sûreté nucléaire, qui a déclenché hier le niveau 2 d’alerte sur l’échelle Ines, reproche au CEA (Commissariat à l’énergie atomique) d’avoir attendu le 6 octobre pour signaler officiellement le stock de plutonium sous-estimé de Cadarache, alors que ce dernier était au courant depuis le mois de juin.
De son côté, le CEA assure n’avoir pris aucun risque inconsidéré lors de l’opération de démantèlement de l’installation que l’ASN a décidé d’interrompre. Cet atelier a été inspecté « vingt fois en trois ans », selon le directeur du centre de Cadarache, Serge Durand, et il est « évident qu’on était loin des limites » question sécurité. Et d’ajouter : « On a averti par téléphone l’ASN » de la sous-estimation du stock, en attendant de « comprendre d’où ça vient » pour le faire par écrit. « C'est un mauvais procès que de dire qu'il y a eu trois mois de retard dans la déclaration », a ainsi fait valoir l'administrateur général du CEA, Bernard Bigot.
« Scandaleux » et « inadmissible » a réagi aujourd’hui sur RTL Chantal Jouanno, secrétaire d’Etat à l’Ecologie : « Il est totalement anormal que sur cette filière que l’on dit extrêmement contrôlée, on découvre que la comptabilité est mal tenue, qu’on ne sait pas exactement combien il y a (de plutonium) et surtout qu’on en soit informé si tardivement. On va voir qui est responsable de quoi et ça permettra de savoir s’il faut que des têtes tombent ».
PS et Verts exigent une commission d’enquête parlementaire
Egalement scandalisés par cette affaire, le Parti Socialiste et les Verts ont demandé hier la création d’une commission d’enquête parlementaire sur le nucléaire. « Le stockage d’une telle quantité de plutonium aurait pu entraîner dans certaines conditions une réaction en chaîne. On ose à peine imaginer les conséquences pour les ouvriers du site voire les populations de la région. L’Etat et le CEA doivent aux Français une transparence totale et fournir des explications sur ce qui est l’un des incidents les plus graves de ces dernières années », a lancé dans un communiqué Aurélie Filippetti, député de Moselle et secrétaire nationale du PS à l’Energie.
« Ce scandale a des conséquences considérables sur la sûreté nucléaire. La présence de grandes quantités de plutonium en un même lieu peut engendrer un accident de criticité, c’est-à-dire une explosion de type bombe atomique », a quant à lui déclaré Yves Cochet, député Verts de Paris. « Le nucléaire échappe depuis trop longtemps à la démocratie, comme il échappe à la rationalité économique, énergétique et sociale. Le Parlement doit s’emparer de ce sujet et ne peut plus se satisfaire des surprises et des déclarations d’intention des ministres en charge », a renchéri Yannick Jadot, député européen Europe Ecologie.
La directrice de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), Marie-Claude Dupuis, sera par ailleurs entendue à l’Assemblée nationale le 21 octobre pour « éclaircir les circonstances de cet incident », a précisé Christian Jacob, président de la commission du Développement durable.